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économie rurale
1 août 2018

Cameroun : les Filières cacao et café en panne

Face à la stagnation de la production cacaoyère et le déclin de la filière café, il faut dénoncer les connivences car le label « origine Cameroun » s’est fondu dans la nullité.

cacao, opération d'écabossage(c)rubenetienne_0764D'une année à l’autre depuis une décennie, la production de cacao stagne autour de 220 000 tonnes alors que celle du café Arabica et du café Robusta régresse. Dans le contexte du  Cameroun, le diagnostic du secteur rural réalisé en 2005 dans le cadre de la finalisation du document de stratégies de développement du secteur rural (DSDSR) et validé quelques années plus tard avec le document de stratégies pour la croissance et l’emploi (DSCE) ont fait de la relance et du développement de ces productions agricoles un axe stratégique pour la croissance de l’économie du pays.

cueillette de café(c)capt_agric-infos

 

Après la libéralisation du marché du cacao et du café et la dissolution de l’office national de commercialisation des produits de base (ONCPB), l’Etat du Cameroun a créé deux structures pour gérer la filière. Il y a le conseil interprofessionnel du cacao et du café (CICC) et l’office national de cacao et de café (ONCC). Ces deux structures sont placées sous la tutelle technique du ministère du Commerce. Il n’est plus question aujourd’hui d’ouvrir des débats interminables sur « la libéralisation était-elle une bonne chose?». Ce débat est définitivement clos depuis 1986. Pourtant, un fait demeure, criard et interpelle le gouvernement. La réalité du terrain reste la même. Les camerounais ne consomment que très peu de cacao et encore moins du café. Très peu de camerounais connaissent le goût de leur cacao. Ils  consomment des produits transformés en Inde ou en France. Le marché local ne peut donc pas absorber les 200 000 tonnes de fèves de cacao ni les 50 OOO tonnes de café mis sur le marché après chaque campagne. C’est donc le marché international qui prend tout et dicte les prix du marché. Le prix payé au planteur dépend donc directement des prix du marché international. Le planteur partage le risque commercial au même titre que l’exportateur. Le prix du produit livré bord champ n’a pas la même valeur lorsqu’il arrive au port, ou encore quand il parvient au port de Londres ou d’Amsterdam.

Lorsqu’en 1995, le gouvernement fait le choix de la libéralisation, il supprime en même temps les opérations de pré-contrôle dont les agents de l’ONCPB, de la SODECAO et de la ZAPI avaient la charge. Dans le nouvel environnement ainsi créé, le planteur devient seul responsable de son produit. Il vend à qui il veut. Il connait très bien la qualité du produit qu’il vend et dès lors, il doit se soumettre à la dure loi du marché. Mais si le planteur ne connait que l’acheteur qui vient enlever son produit bord champ ou au magasin de sa coopérative, en réalité, la chaîne des acteurs de la filière est plus longue. Ceux qui s’enrichissent le plus ne sont pas ceux que vous croyez. Ils sont nombreux. Outre le planteur, il y a donc l’exportateur ou son mandataire, il y a les sociétés de certification, il y a les sociétés de transit, il y a les grandes surfaces en Europe… et au niveau local, il y a les usiniers.

Mais revenons à la qualité du cacao et café que vend notre planteur. Le marché international n’est pas un fourre-tout où chacun vend ce qu’il veut. Il y a des normes de qualité à respecter. Un produit qui ne respecte pas ces normes est vendu à un prix plus bas. Un produit qui a été bien traité et est appelé « good fermented » est payé plus cher. C’est ici qu’il faut dénoncer la connivence entre les exportateurs camerounais de cacao qui ne tiennent pas compte des efforts de tel ou tel planteur. Ils sont seuls à apprécier la qualité du produit, ils font des réfractions à la pelle et finalement le cacao de qualité supérieure n’a pas plus de valeur que le hors standard. Le cacao camerounais a perdu son label. Il est vendu sur le marché international sous forme de vrac. Il n’a plus aucun label. Le label « origine Cameroun » s’est fondu dans la nullité. 

Le conseil interprofessionnel du cacao et du café (CICC) qui réunit en son sein tous les acteurs de la filière devrait se saisir de ce problème et imposer la différenciation des prix sur le marché local, entre un cacao « good fermented » et un cacao « fair fermented ». L’Etat pour sa part doit intervenir et casser ce monopole. Il faut que les exportateurs apprennent à payer le juste prix aux planteurs les plus méritants. Ce prix ne doit pas seulement être mécaniquement déduit du prix FOB.

Ruben Etienne, Journaliste / Point de vue publié dans le journal Agric-infos du 20 Juillet 2018 / Cameroun

 

 

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